Le 28 mars dernier, un bus de la compagnie FLIXBUS, partant de Berlin en direction de Zurich, a dévié de sa route provoquant un grave accident sur sol allemand. Parmi les 54 passagers, on ne compte pas moins de 29 personnes légèrement blessées, 6 grièvement et 4 morts.
Instinctivement, nous serions tentés de conclure qu’un accident en sol allemand appelle les juridictions allemandes, mais cette conclusion est en réalité inexacte. Dans l’optique de protéger les consommateurs, nos législateurs ont prévu des moyens d’action devant les juridictions du lieu d’habitation du consommateur. L’idée étant de faciliter la défense du consommateur, qui est généralement un individu démuni, face à des géants du monde économique.
Conformément à l’art. 114 al. 1 LDIP, l’action intentée par un consommateur, qui réalise les conditions supplémentaires de l’art. 120 al. 1 let. a à c, peut être porté, à son choix, devant le tribunal suisse de son domicile ou du domicile du fournisseur. L’al. 2 précise que le consommateur ne peut pas renoncer d’avance au for de son domicile, ce qui signifie qu’une quelconque stipulation contractuelle d’élection de for n’exclut pas la possibilité d’agir au domicile du consommateur.
Mais qu’est-ce qu’un « consommateur » ? L’art. 114 al. 1 LDIP renvoie à l’art. 120 al. 1 LDIP pour le définir.
Conformément à l’art. 120 al. 1 LDIP, le consommateur est celui qui a passé un contrat portant sur une prestation de consommation courante destinée à son usage personnel ou familial et qui n’est pas en rapport avec l’activité professionnelle ou commerciale dudit consommateur. Le consommateur est donc celui qui achète pour un usage non-professionnel.
L’art. 114 al. 1 cum 120 al. 1 let. a à c LDIP prévoit des conditions supplémentaires pour ouvrir un for en Suisse. Il faut, soit (a) que le fournisseur du consommateur ait reçu sa commande en Suisse, soit (b) que la conclusion du contrat (l’achat) ait été précédé d’une offre ou d’une publicité en Suisse et que le consommateur y ait accompli les actes nécessaires à sa conclusion, ou soit (c) que le consommateur ait été incité par le fournisseur à se rendre dans un État étranger aux fins d’y passer la commande.
En somme, pour ce qui est du cas FLIXBUS, cela signifie qu’une action en responsabilité contractuelle pourrait être intentée en Suisse par les passagers vivant en Suisse et qui n’étaient pas dans le bus accidenté pour des raisons professionnelles (ex. vacances, voyage familial, etc.) si ces personnes réalisent l’une des conditions de l’art. 120 al. 1 let. a à c, la plus simple d’entre-elles étant d’avoir fait l’objet d’une publicité de ladite société en Suisse.
Il va sans dire qu’un for ne suffit pas pour obtenir gain de cause, il faut encore réaliser les conditions usuelles d’une action en responsabilité contractuelle, à savoir (i) une violation du contrat, (ii) un dommage, (iii) un lien de causalité entre la violation du contrat et le dommage, et (iv) une faute de celui qui a violé le contrat.
Si la faute est présumée et que la violation du contrat serait aisément admise – la sécurité du voyage faisant partie intégrante d’un contrat de transport – il reste encore à prouver un dommage qui soit en lien de causalité avec la violation contractuelle.
Vous l’aurez compris, ces quelques lignes ne réfleten tque notre opinion et ont également vocation à inviter les justiciables touchés par un tel accident, à faire valoir leurs droits.